L’EDEN RETROUVE Chris ACHER
Tel Proust, foulant sur la Côte Fleurie
Le sable Belle Epoque des plages où au siècle dernier
Débarquèrent sous le feu les Alliés de la Liberté,
Il me suffit de mettre en bouche une saveur… un fruit,
Pour que le ‘paradis perdu’ devienne ‘l’Eden retrouvé’.
Lors, à l’ombre des pommiers en fleurs,
Je revois s’ébattre, gourmands, les étalons pur-sang
Près des vaches à lunettes rousses, sous l’œil méfiant du paysan,
Affairé près de sa chaumière à pans de bois dont émane une odeur :
Celle de l’or, tiré du cidre, qui fait le ‘trou normand’.
Mes vertes années courent à nouveau dans les creux chemins
D’un pays de Conquérants que la nature a apprivoisés,
Comme galope la marée, autour de saint Michel, dans sa baie,
Ou le vacancier sur l’estran blond de Deauville, léché par les embruns
Quand le temps est incertain et le ciel plombé.
Sous la lumière chatoyante d’une prairie bouton d’or,
Reviennent mes étés et leurs mille sensations en un bouquet
Cueilli dans le jardin, touché par la Grâce, d’une mamie en tablier
Dont la gelée de pommes, fondant sur le palais, demeure un trésor
Que ne peuvent ravir aux petites filles ni le temps ni son sablier.
Passe la maturité dans son cortège de voyages,
Menacent les pleurs d’orages et les feux de l’automne,
Rouillent les hivers décharnés les plus monotones,
Je savourerai toujours une tranche d’Eden ‘hors d’âge’
Lorsque, les yeux fermés, je croquerai dans une pomme.