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Ginette pleurait…

 

Ginette pleurait, dans le calme d’une nuit,

Des sanglots étouffés résonnant sans un bruit,

Au bout de la table, perdue en ses pensées.

Claire dormait insouciante à point fermé.

 

Trois années, déjà, que la petite était née.

Bientôt, sa maman chérie l’abandonnerait.

Elle partira comme chacun part un jour,

Pour ce voyage sans un espoir de retour.

 

Elle laissera ses proches, un jour discret,

Dans l’embarras des demains noyés de regrets.

Ginette, sexagénaire pleine de vie

Voyait sa petite amie la quittait ainsi.

 

Ginette, presque sans une larme, pleurait,

Oubliant que la petiote sommeillait tout près.

Comment s’occupera-t-elle de la petite

Quand sa jeune compagne prend déjà la fuite ?

Dans sa vie, d’avant la rencontre avec sa muse,

Elle n’avait trouvé l’amour, comme une excuse,

Dans un mariage bâclé et vite explosé.

Longtemps là, elle était ainsi seule restée.

 

La vie de Ginette était paisible à souhait,

De nombreuses années, seule, presque enfermée

Dans un mutisme social presque provoqué

À l’abri de ces rencontres à éviter.

 

Elle apprenait à vieillir insensiblement

Avec la sagesse qui protège du temps,

Retardant un tant soit peu les effets de l’âge,

Elle avait conservé un avenant visage.

 

Une personne simple presque trop discrète

Un tant soit peu incompréhensible, désuète.

Dans la vie des autres, une ombre imperceptible,

Les humeurs de certains sont bien trop susceptibles.

 

Ginette, d’un charme usé, désuet, dégageait

Une douce élégance qui l’illuminait,

De celle qui enferme au fin fond du cœur

Des meurtrissures du passé comme une erreur.

Céline, il y a dix ans déjà peut-être,

Frappa à sa porte pour louer une studette

Elle était étudiante jeune et insouciante

Elle respirait la jeunesse exubérante.

 

Cette soirée, il pissait des cordes frisquettes,

Ginette lui prêta une chaude serviette,

Sans une arrière-pensée, pour sécher l’outrage

Que la nature réserve aux gens de passage.

 

L’évènement eut le don de briser la glace,

D’engager un dialogue de mots qui s’effacent.

Elle s’installa dans le petit logement,

Tout était normal, jusqu’à ce soir différent.

 

Ce fameux soir, où se sont parlé, leurs regards,

Sans un mot, quand les cœurs se perdent au hasard,

Quand ils n’entendent pas et ne comprennent plus

Ce que la raison ne peut maitriser non plus.

 

Ce soir, où une déjà presque vieille dame

Caressait les mains douces d’une jeune femme

Qui dégageaient une chaleur incontrôlée

Et faisaient naitre des sentiments contrastés.

Ce tendre geste était sans aucune intention,

Céline, ne repoussa en rien l’attention.

La maladresse se prit pour une caresse,

Répondit voluptueusement à la tendresse.

 

Une histoire douce d’amour s’établissait

Dans la pureté de sentiments partagés.

La différence s’estompe en délicatesse,

Seule une vive étincelle en le regard, reste.

 

On ne pardonne qu’une demoiselle, belle,

Se laisse câliner à perdre ses deux ailes

Par des mains âgées à l’épiderme flétri

Et aussi par un regard bien trop averti.

 

La vie, de sentiments jaillis du fond du cœur,

Dessinait des demains cachés de bonne sœur.

Chaque jour voyait un horizon sans un nuage,

Les cieux colériques étaient beaucoup moins sages.

 

Puis, plus tard, en Céline, des espoirs cachés

S’éveillaient… le désir d’une maternité.

C’est une histoire peu banale qui a fait

De paillettes inconnues un petit bébé.

Ainsi naquit Claire, avec une maman,

Utérine et l’autre… de presque soixante ans.

Les enfants, quand petits, ne font de différence

Comme sont les adultes en leur dissemblance.

 

Ginette pleurait, dans le calme d’une nuit,

Des sanglots étouffés résonnant sans un bruit

Au bout de la table, perdue en ses pensées.

Claire dormait insouciante à point fermé.

 

Comment veiller sur Claire fragile enfant

Quand Céline s’épuise et part doucement

Vers le petit monde des enfants orphelins

Où la compagne ne peut comprendre demain ?

 

Et demain ou bien un tout autre jour prochain,

Céline partira, seule, sans aucun bruit,

Laissant, à celle qui doit se taire, l’indifférence,

Ginette n’a le droit de montrer sa souffrance.

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